Interview d'Hervé Maurey Président de la commission d'aménagement du territoire et du dévelo
Peut-on fermer les petites lignes de chemin de fer ? La réponse d’Hervé Maurey, sénateur de l’Eure (Union centriste), président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
Les élus locaux peuvent se retrouver sur un certain nombre de points du rapport de Jean-Cyril Spinetta. Mais sa perception du chemin de fer et de son rôle les inquiète au plus haut point, voire les agace. Son approche du réseau des petites lignes est purement économique. Il ne met pas en balance l’intérêt d’une desserte équilibrée du territoire pour les usagers.
Le réseau ferroviaire a un rôle primordial en la matière. Sa pertinence n’est pas uniquement réservée, comme semble le penser Jean-Cyril Spinetta, aux transports du quotidien en zone urbaine et périurbaine et aux dessertes à grande vitesse entre les principales métropoles. La mobilité est aussi essentielle pour les habitants des petites villes et des communes rurales. La suppression des petites lignes pour des raisons de rentabilité les exclurait de fait un peu plus de la modernité.
Car il ne faut pas se tromper. Ce sont toujours les mêmes territoires qui sont concernés : ceux qui perdent déjà leurs services publics, leurs hôpitaux ou postes, qui voient partir les médecins, et où la téléphonie mobile est défaillante… Leurs habitants se sentent déjà un peu des citoyens de seconde zone. La suppression des dessertes ferroviaires ne ferait qu’accroître leur sentiment d’abandon. Ces citoyens attendent au contraire depuis de nombreuses années une amélioration de ces lignes.
On ne peut donc pas regarder le chemin de fer avec une vision comptable. Avoir une gare et un train qui la dessert n’est pas une question d’image de marque pour les élus. Cela permet de ne pas être coupé du monde. Les infrastructures utiles et structurantes doivent être conservées. Le train doit être maintenu s’il permet un confort et de meilleurs temps de transport que la route, ce qui est souvent le cas.
Les choses ne sont pas figées bien entendu. Si l’on peut prouver qu’une ligne de car peut remplir les mêmes fonctions sur une ligne quasi désertée, discutons-en. On peut aussi revoir les choses quand des évolutions technologiques offriront d’autres solutions, par exemple les véhicules autonomes qui pourraient même emprunter l’emprise de ces lignes, comme l’a suggéré le rapport Duron sur les infrastructures.
Les collectivités locales ont le sentiment qu’on veut leur faire supporter de plus en plus la prise en charge financière de ces lignes. Le rapport Spinetta préconise aussi de faire payer davantage les régions pour l’accès des trains TER au réseau. Voire de prendre en charge les lignes déficitaires si elles désirent les conserver.
L’approche de ce rapport est trop brutale. Heureusement, ce n’est qu’un rapport et je n’imagine pas le gouvernement mettre en œuvre cette partie des préconisations. Cela ne ferait que conforter certains technocrates qui estiment qu’il n’y a pas de salut en dehors des métropoles.